feulefeu

FEU LE FEU

Vendredi 21 juin 2019 à 14:53

J'ai les yeux qui perlent, des sanglots noués dans la gorge. Tu attends, tu apaises, puis tu m'invites à poursuivre ce récit.

Après, Tombeau, j'ai vécu dans le feu. Le feu. Les danses, sanguines et exaltantes. Le feu. La peau brûlée, les morsures de ses flammes. Le feu. Le feu qui engloutit, qui carbonise. Le feu qui noircit l'âme, noircit le coeur. Le feu qui dévisage, le feu qui me rend chienne. Ce feu au creux du ventre, toujours ce feu. J'ai les pieds noirs à danser dans le feu. Calcinée, je suis l'enfant noire, petite fille du charbon. Je suis noire, je suis noire quand je danse dans ce feu, dans ce brasier je suis noire. Je suis blanche mais je suis noire.
Quel âge as-tu, Abysse, quand tu danses dans ce feu ? Les petites filles, les petites chiennes n'ont pas à danser dans le feu, dit ma grand-mère. Mon père ajoute qu'il aime les petites filles blanches, observer leurs peaux liliales. Alors je lutte pour perdre la brûlure, reprendre le goût du lait. Mais déjà s'éclaire l'aube pressée sur la nuit dressée de l'enfance. Je grandis. Je commence à me voir, miroir, dans leurs yeux d'hommes, leurs yeux d'hombres, leurs yeux d'ombres qui posent sur moi un regard-envie. Commencer à se donner à eux à l'abri du soleil. Je cultive l'illusion que ça me sauve. La vérité, c'est que je suis déjà cuite.

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